Ce n’est plus un secret, le port d’Abidjan est l’un des plus importants de la sous-région. Ses signaux sont tous plus que jamais au vert : chiffre d’affaires en milliards, trafics estimés en millions, objectif toujours plus haut : devenir le 2ième hub portuaire derrière Durban (Afrique du sud) plateforme de référence en Afrique subsaharienne. Face à ces ambitions se dresse le concurrent le plus inquiétant: l’embouteillage. Constants, rependus, pervers, destructeurs,les bouchons sur les boulevards de Vridi et du Port telles des pieuvres s’incrustent, étendent leurs métastases au grand dam aux entreprises implantées dans cette zone.Tour d’horizon secteur par secteur ce vendredi 30 Octobre 2015
Il est 7 heures 30 mn, à quelques pâtés du carrefour du CHU de Treichville, une longue file de véhicules. Le bruit assourdissant des klaxons est le principal refrain entendu. Certains chauffeurs, très impatients manœuvrent comme de beaux diables pour se frayer un chemin…Les autres plus calmes sont en fait des habitués des lieux. Rien d’étonnant selon eux car familiers de cette ambiance. Le carrefour suivant est plus engorgé, l’air semble plus lourd.
Bienvenue sur le boulevard de Vridi
Une fois, ces obstacles franchis, le spectacle est tout autre : une haie de camions vous accueille comme pour vous souhaiter le traditionnel Akwaba ivoirien : bienvenue à Vridi ! De part et d’autre de la chaussée, de gros engins stationnés depuis plusieurs jours. Ils sont visibles depuis le Seamen’s club jusqu’au pont de Vridi en passant par le feu de la Sotra. Les conducteurs confortablement installés sous des tentes, nattes, hamacs et autres lits picots, leurs abris. Ce dispositif d’urgence mis sur pied par ces convoyeurs est pour eux le moyen de rester dans la file d’attente. Ces derniers, y sont pour, soit un déchargement de conteneurs au terminal, soit un enlèvement de conteneurs pour ensuite les livrer aux clients. Mamadi, Sidibé et Diomandé sont trois des leurs. Venus de l’intérieur du pays pour certains et du Burkina Faso pour d’autres avec des matières premières destinées à l’export, ils sont détendus, patients et papotent sous le camion de 10 tonnes plein de fève de Cacao . Il est 12 heures 30 mn, soit 5 heures plus tard, leur position reste la même.
Le carrefour Gestoci, une bombe à retardement
Cap est mis sur le carrefour Gestoci, à raison dénommé,carrefour du désordre. Ce croisement de voies est connu comme l’une des sources des ralentissements dans toute la zone portuaire, conséquence d’une absence d’espace pour le parking des mastodontes. Pour réaliser son objectif de gestionnaire des stocks des produits pétroliers, cette entreprise s’est dotée de moyens et de techniciens qualifiés mais n’a pas pensé à se doter d’un site assez vaste pour parquer les citernes locales et celles issues de ses réseaux de distribution (Mali, Burkina-Faso, Gambie, Nigéria). Aux alentours de ce lieu hautement inflammable, se sont développées des activités commerciales . Des restauratrices s’activent sur des fourneaux à charbon afin de nourrir leur clientèle, transformant ce lieu en une bombe à retardement. Notons que l’installation anarchique de ces dernières en ces lieux a fortement contribué au rétrécissement de la chaussée. Les trottoirs envahis n’existent que de noms. Cette situation limite ainsi la marge de manœuvre des routards sur une voie déjà dégradée.
L’état de la route
L’autre « atout » de la congestion du trafic dans la zone portuaire demeure l’état piteux de la voirie. On se perd en conjecture devant les surfaces occupées par les nids de poules dont on n’éprouve aucune difficulté à trouver des synonymes : trous béants, crevasses, et creux se disputent les parcelles à occuper. Sans oublier, une chaussée déformée qui s’est aussi invitée au décor de cette artère, l’une des plus fréquentées de notre pays.
C’est à croire que les ingénieurs en charge de la rénovation de cet axe initié en 2011 ne sont pas compétents ?
Le port d’Abidjan, jadis fier de ses voies d’accès, nous offre aujourd’hui un honteux spectacle avec ses voies dégradées et les camions qui jonchent le long des voies.
Evidemment, tout cela constitue un environnement à risque pour les poids lourds chargés à bloc la plupart du temps. D’ailleurs les accidents sont légions dans cette partie de notre capitale économique, nous confiait Traoré, chauffeur livreur dans la zone : « Lorsqu’il y a un accrochage ou un véhicule qui se renverse, c’est la fin de journée pour nous. Les dépanneuses mettent du temps à se frayer un chemin. Et lorsqu’elles sont là, il faut patienter plusieurs heures pour l’enlèvement.» explique le vieil homme nostalgique des années antérieures. « Avant pour mes livraisons dans la zone, il me fallait 30 minutes, mais ça c’était avant »
Petit tour à bord de son camion
Feux tricolores+ Policiers = Embouteillages
En plus des feux tricolores qui n’existent que de nom, un important déploiement des forces de l’ordre régule la circulation… pour la forme car mais rien n’y fit ! La présence des policiers n’aide en réalité à rien. Semble- t’ils qu’ils soient plus préoccupés à effectuer des contrôles de routine. Les ralentissements sont inévitables par conséquence.
Les entreprises basées dans cette zone payent le lourd tribut de ce mal qui coûte en temps. Des opérateurs portuaires (Maersk, Global Manutention, Movis) aux industriels (Unilever, Sania, Palmci) en passant par les entreprises pétrolières (Vivo Energy, Petroci, Oil Lybia…) entre autres, tout le monde paie cash.Le facteur retard est désormais pris en compte, il s’ingère de force à tous les niveaux : aussi bien au travail, dans les rendez-vous, que dans les livraisons. Certaines firmes sont contraintes de prolonger le temps de travail à 22 heures parce qu’obligées d’attendre la clientèle. Un rallongement horaire coûteux dont la facture passe difficilement. « La Sitca et le guichet unique sont les entreprises qui nous tuent ici . Ces deux entreprises sont celles qui drainent le plus de véhicules dans cette zone pourtant elles n’ont pas de parking capables de contenir ce flux de véhicules » accuse Bedel, un livreur de la zone. Le camionneur comptabilise 3 années d’ancienneté et dit ne pas s’habituer à ce rythme de travail. Pour arriver chez son fournisseur, l’homme doit affronter quotidiennement le labyrinthe de véhicules venus passés l’examen du contrôle technique. La situation est bien pire du coté du guichet unique. « Les France au revoir (véhicules d’occasions) déchargés des navires sont confrontés au même problème d’absence de parking » ajoute- t-’il.
Dommage pour une économie qui se veut leader dans la sous-région !
Dommage pour le port d’abidjan et ses opérateurs !
Dommage pour les travailleurs de cette zone !
Pauvre Côte d’Ivoire !
En espérant que notre article soit lu par ceux qui ont des yeux pour lire et notre coup de gueule entendu par ceux qui ont des oreilles pour entendre.
Coucou ! C’est un très bon article, chapeau à toi journaliste !