Les «classes passerelles», une autre chance

Selon l’UNICEF, au moment des récoltes, plus d’un million d’enfants travaillent dans les plantations de cacao de Côte d’Ivoire. […] le travail les empêche d’aller à l’école et contribue à perpétuer la pauvreté. Un projet baptisé « classes passerelles » cofinancé par Nestlé et la fondation Jacobs vise à travers le programme Trecc (Transformer l’Education dans les Communautés de Cacao) à rectifier le tir. Des classes sont donc construites dans 35 communautés ivoiriennes et un point d’honneur est mis sur la qualité de l’éducation prodiguée dans ces zones. Le projet ratisse large. Il donne également une seconde chance aux déscolarisés ainsi qu’aux enfants âgés de 9 à 14 ans qui n’ont pas eu la chance d’aller à l’école de (re)venir sur les bancs. Visite de terrain dans la localité de Binao.

C’est le village de Dissa Nafon, sacré meilleur producteur ivoirien de cacao en 2017. L’homme  revendique à lui seul 124 hectares de cacao dans sa localité située à 25km  de Duékoué. Une fois à Binao, l’odeur de pesticide témoigne de la forte activité agricole dans cette localité de plus de 2000 allochtones. Le village est pratiquement vide ce jour. Ce sont les vacances scolaires et la petite saison des planteurs.  Les paysans sont occupés au désherbage, au planting et à la petite récolte dans leur plantation quand de jeunes élèves en tenue sont en cours. Leur bâtiment jaune chapeauté de feuille de toile  est mitoyen à celui de l’école primaire formelle aux portes fermées. « La proximité n’est pas fortuite. Tout est réuni pour la bonne intégration de l’élève des classes passerelles et faciliter son insertion vers les classes formelles » déclare Koné Nourgo, agent terrain du programme Trecc.

Ils sont une trentaine ce jour à suivre la leçon de mathématiques, agités, et promptes à répondre aux questions de l’instituteur. Leur point commun, ils sont tous fils ou filles de planteurs, âgés de 9 à 14ans, soit déscolarisés, soit  jamais scolarisés ou « enfants travailleurs ». Ils sont   en classe de CPU (Cours Préparatoires Unifiés) qui équivaut au niveau CP1 et CP2 réunis. Parmi eux, Yao Cyriac,  9 ans, premier de classe se distingue par ses bonnes notes. Pourtant son père Yao Oufouet Marcelin, planteur à Binao depuis 1984 avoue s’être fait accompagner par son fils dans un passé récent dans sa plantation pour lui donner un coup de main. « l’école formelle n’est pas totalement  gratuite, par manque de moyens, et de peur de le laisser sans surveillance au village, j’emmenais mon fils dans mon champ. Là-bas, il surveillait le repas, m’apportait de l’eau quand le besoin se faisait sentir, aucune lourde tâche  ne lui était imposée et depuis l’arrivée du programme classe passerelle qui est totalement gratuit, je suis rassuré de partir au champ et le laisser au village. Il apprend et s’occupe sainement » affirme  M. Oufouet visiblement soulagé. Le producteur de Cacao est membre de la coopérative  CAEG qui produit 2000 tonnes de cacao l’année.

Les cours

Débutée le 13 décembre 2017, la seconde vague  des cours en classes passerelles prendra fin en août 2018. Les cours ont lieu tous les jours ouvrables de la semaine aux mêmes horaires que ceux des cours formels. Sont dispensés dans ces classes la lecture, l’écriture et les mathématiques. Des études montrent que le niveau d’instruction de base de la Côte d’ivoire  en général et dans les zones rurales en particulier est faible. Selon une évaluation conduite par le ministère de l’éducation nationale de Côte d’Ivoire en 2016, 77% des élèves testés en classe de CE1 avaient un niveau en lecture qualifié de mauvais ou de très mauvais par rapport au niveau attendu. 80% des élèves n’avaient pas atteint le seuil suffisant de maîtrise en mathématiques. Ce programme apparaît ainsi comme une réponse adaptée à la situation de ces élèves selon Koné Nourgo.

Au terme des 9 mois d’apprentissage, les enfants  subiront une évaluation supervisée par le ministère de l’éducation nationale et seront insérés dans le circuit formel d’éducation de Côte d’Ivoire. Ainsi  les enfants performants  seront reversés en classe de CM1, Les  moyens rejoindront la classe de CE2 et ceux ayant encore des lacunes intégreront les classes de CE1.

La formation des formateurs

Un bénévole recruté par les agents de la fondation International Cacao Initiative. La règle veut que ce soit un fils de la communauté. Ouphouet Charles Eric en occurrence, pour les classes passerelles de Binao. Ouphouet, la vingtaine , a un niveau  seconde et est un ancien du lycée moderne de Duékoué.  Il suit une formation accélérée de 2 semaines à travers laquelle il apprend à communiquer en situation d’enseignement, à maîtriser des connaissances de base (didactiques de l’expression, didactique des mathématiques (nombres), didactique de la lecture. Des contrôles mensuels sont effectués par des agents de la fondation ICI question de d’évaluer le travail du bénévole.

Des résultats encourageants

Le projet lancé pendant l’année scolaire 2016-2017 débute avec 20 ‘‘Classes passerelles’’. Après le test d’évaluation sur 507 enfants enrôlés 493 sont transférés à l’école formelle. La seconde vague de 2017-2018 concerne  35 classes. Le test  d’évaluation est en cours d’exécution.  Une troisième vague suivra pour la rentrée scolaire 2018-2019.

You May Also Like

About the Author: drorita

2 Comments to “Les «classes passerelles», une autre chance”

  1. Bonjour. Retraité français résidant à Abidjan, je pourrais me rendre disponible pour donner de mon temps à ces classes passerelles. Pourriez-vous me mettre en contact avec les personnes responsables de ce programme.
    Par avance, merci.
    Patrick Gufflet

    1. Bonsoir M.
      Je vous donne le contact de la chargée de communication du projet Trecc. Elle se nomme Clara Sanchiz. Son contact: 05 55 36 29

Comments are closed.