Guiglo consomme la "chose"

De la viande de brousse vendue en bord de route à Yamoussoukro, en Côte d'Ivoire. La chasse au gibier de brousse a été interdite, pour éviter la propagation du virus Ebola.
Source image: Rfi

La résurgence d’Ebola n’inquiète pas l’OMS, les populations de Guiglo non plus. Pendant que l’épidémie fait son dernier mort en ce début de mois d’avril au Libéria voisin (371km) et donne  des sueurs froides aux pays non touchés mais encerclés par la menace, notamment la Côte d’Ivoire, les populations de Guiglo, elles, renflouent les marmites de  viande de brousse. Présent dans pratiquement tous les ménages et restaurants de la cité de la paix (Guiglo en Wè), le goût du risque est savouré  et commercialisé à Guiglo et environ  en toute impunité.

Le risque Ebola plane encore sur la terre d’Ivoire comme une épée de Damoclès. Le 3 avril dernier un nouveau cas a été découvert à Monrovia (Libéria) quelques mois après que le pays a été déclaré « Ebola free ». La maladie a refait surface au dans ce pays voisin quelques jours après sa résurgence en Guinée , où elle a fait au moins sept morts sur huit cas recensés depuis mi-mars.  Mais les populations n‘ont que faire de ces mesures prisent par l’autorité ivoirienne notamment la période d’observation de 3 mois qu’elles jugent trop longue  « Pour nous Ebola est finie il y a de cela belle lurette. Nous sommes de pauvres paysans dont les terres sont occupées , nous sommes obligés de nous rendre en brousse pour avoir quelques chose dans nos sauces» déclare un paysan   fan de la viande de brousse.

A 5000 fcfa pour les singes et biches  et 3000 agoutis, hérissons et autres cette viande s’arrache comme de petits pains. La demande est tellement forte que la précieuse chair rouge ne s’obtient que sur commande.

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Dans les restaurants, en ville, l’on ne prononce pas le  nom de peur des représailles des autorités. A Divo, 304km de Guiglo, une phase  répressive fut lancée le 8 avril dernier. Elle consistait en des visites inopinées dans les restaurants, « maquis » et tout autre lieu de restauration. Elles  conduisent à des amendes et même arrestations pour tous ceux qui auront décidé de braver l’interdiction gouvernementale de manipuler de quelque façon ce type de viande.

Mais les travailleurs friands de ce goût, au parfum de ces « intrusions » de l’autorité usent de tout un stratagème. Ils  la baptisent « la chose ». Un code très vite détecté par les restauratrices qui s’empressent de  déballer la spécificité du menu du jour.

« je ne réalise aucun invendu avec la viande de brousse » avoue une restauratrice. La dame dit avoir recours à son propre chasseur pour sa provision. « Avec une cartouche de balles, je passe un deal avec le chasseur. Je lui offre une pour sa propre chasse et une pour moi. A ce prix, j’ai au maximum 5 agoutis. Autre stratégie, je l’envoie à la chasse qu’il pré finance, puis je lui achète sa marchandise à un prix abordable ». poursuit-elle.

Quant aux autorités locales, elles sont informées de  cette habitude risquées des populations mais ne disposent d’aucun moyen de saisie. Mais pire, elles s’adonnent également à la consommation. « Nous partageons cette viande avec ces mêmes personnes qui nous chantent à longueur de journée de ne pas en consommer » Explique un fonctionnaire venu se restaurer.

Rappelons que Ebola est une maladie grave qui a ameuté toute l’Afrique de l’ouest il y a de cela 1an. Le bilan reste lourd, les autorités parlent de plus 11 000 morts assortis à d’importantes conséquences économiques, sanitaires et mêmes politiques dans la sous-région. La consommation et/ou manipulation de la viande de brousse contaminée par Ebola reste l’une des causes de mortalité les plus évoquées.

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